|
in Actualités de la conservation, n° 3, avril 1997
Ce texte a été élaboré par la Direction des Services de Conservation en concertation avec les deux directions des collections (DIA et DCS) et la Direction du Développement Culturel (DDC). Il reflète l'état actuel des connaissances en matière de conditions de conservation des documents graphiques et photographiques.
Les recommandations émises dans ce document sont d'ordre général. Chaque exposition constitue un cas particulier. Néanmoins, le respect de ces recommandations est essentiel pour protéger les documents graphiques et photographiques pendant toute la durée de l'exposition.
Généralités
Il n'est pas recommandé d'exposer des documents graphiques et photographiques dans des salles non climatisées.
Les documents exposés ne doivent pas être en contact direct avec le public. Ils doivent soit être exposés à l'intérieur des vitrines, soit protégés par un encadrement approprié.
L'exposition permanente de documents graphiques et photographiques est à proscrire.
Les documents à exposer ne doivent pas être contaminés par des micro-organismes, ni être infestés par des insectes.
Exposition de courte durée
Lorsque des documents graphiques et photographiques sont exposés dans un endroit non climatisé, la durée d'exposition ne doit pas excéder un mois. Il faut essayer de créer un microclimat autour des documents pour approcher le plus possible leurs conditions de conservation habituelles.
Exposition de longue durée
Des expositions de longue durée ne doivent être réalisées que dans des espaces climatisés et il faut veiller à ce que les conditions climatiques pendant l'exposition soient les plus proches possibles de celles du stockage habituel des documents. Toutefois pour des documents graphiques et photographiques la durée d'exposition ne devra pas excéder trois mois par an.
Prêts
Les documents prêtés doivent être protégés pendant le transport (aller/retour) comme pendant l'exposition. Il faut que les conditions habituelles de conservation soient respectées et maintenues stables.
Les matériaux organiques, constituants majeurs des documents graphiques et photographiques, sont hygroscopiques, ce qui les rend particulièrement sensibles aux variations climatiques. Humidité relative et température sont deux paramètres liés. Dans un volume fermé (par exemple une vitrine vide) contenant une quantité de vapeur d'eau donnée, l'augmentation de la température provoque une diminution de l'humidité relative et vice-versa.
Les mauvaises conditions climatiques jouent un rôle prépondérant dans les dégradations subies par les documents graphiques et photographiques. Un air sec fragilise les documents par le racornissement qu'il produit. Un air humide et non ventilé favorise l'apparition de moisissures sur les documents. Une chaleur excessive accélère les réactions de dégradation chimique. Le respect et le contrôle des bonnes conditions thermohygrométriques sont donc essentiels.
Le papier, le cuir et le parchemin doivent être maintenus dans une atmosphère de 18°C + 1°C avec une humidité relative de 55% + 5%. Les photographies devraient être exposées dans une atmosphère ne contenant qu'un taux d'humidité relative de 40% + 5%.
Les variations de l'humidité relative doivent être inférieures à 5% par heure.
Tous les documents graphiques et photographiques se dégradent lorsqu'ils sont exposés à la lumière et plus particulièrement sous l'influence des rayons ultra-violets (UV) que contiennent la lumière du jour, les lampes fluorescentes (tubes au néon) et les lampes incandescentes à halogène (leur ampoule en quartz laisse passer ce type de rayonnement).
Pour cette raison, la lumière du jour doit être occultée. Lorsqu'on utilise des lampes fluorescentes (tubes au néon) ou des lampes halogènes, il faut impérativement les munir de filtres UV. Après pose de ces filtres la quantité de rayons ultra-violets émis devra être inférieure à 75 microwatts / lumen.
Les lampes à incandescence (surtout les lampes halogènes) dégagent beaucoup de chaleur. Pour cette raison il est impératif de ne pas les installer à l'intérieur des vitrines. Lorsque des fibres optiques sont utilisées pour éclairer l'intérieur des vitrines, il faut installer l'alimentation électrique à l'extérieur des vitrines et équiper l'installation d'un variateur de puissance. Lorsque des lampes à incandescence sont montées sur les cimaises sur lesquelles les documents sont présentés, il faut les munir obligatoirement d'un variateur de puissance accessible, d'un écran anti-chaleur.
Dans tous les cas le niveau d'éclairement ne devra pas dépasser 50 lux pour exposer des documents graphiques particulièrement sensibles (aquarelles, dessins, gouaches, pastels, enluminures, manuscrits modernes...) et des photographies historiques en noir et blanc ou en couleur.
L'effet de la lumière étant cumulatif, il est recommandé de ne pas dépasser un maximum de 36 000 lxh par an (nombre de lux multiplié par le nombre d'heures d'exposition), soit une durée d'exposition de 90 jours de 8 heures par jour.
Conditions climatiques
Pendant toute la durée de l'exposition les conditions climatiques régnant dans les espaces d'exposition doivent être surveillées en continu au moyen de thermohygromètres enregistreurs (mécaniques ou électroniques).
Lorsque les conditions climatiques sont mauvaises (niveau, stabilité), il faut prévoir l'installation d'humidificateurs ou de déshumidificateurs indépendants pour atteindre les conditions climatiques recommandées.
La lumière du jour ou la lumière zénithale sont à éviter absolument (poser des stores ou tendre des vélums).
Aménagement intérieur
Les matériaux et revêtements utilisés dans les espaces d'exposition ne doivent présenter aucun risque pour la conservation des œuvres. En outre, ils doivent correspondre à la législation en vigueur concernant la prévention d'incendies (classement M1 *).
Les éléments de décors doivent être stables et ne présenter aucun risque d'effondrement. Les allées de passage doivent être d'une largeur au moins égale à 1,40 mètre.
Les éléments de décors ne doivent pas occulter les bouches d'aération ou de soufflage d'air conditionné.
Position
Les vitrines ne doivent pas être placées dans des zones soumises à des fluctuations rapides de température et d'humidité relative (par exemple près des fenêtres pouvant être ouvertes ou près des portes donnant sur l'extérieur).
Construction
Le climat recommandé doit être respecté et maintenu stable soit dans les espaces d'exposition, soit à l'intérieur de la vitrine.
Si les conditions climatiques sont satisfaisantes à l'intérieur des espaces d'exposition (relevé annuel indispensable pour en juger), les vitrines peuvent être perméables à l'air environnant à condition de prévoir un système filtrant pour empêcher l'introduction de la poussière.
Si les conditions climatiques ne sont pas satisfaisantes à l'intérieur des espaces d'exposition, les vitrines doivent être étanches. Le taux d'humidité relative souhaité peut être atteint et maintenu - indépendamment de la température - en plaçant à l'intérieur des vitrines des matériaux tampon conditionnés au bon taux d'humidité relative (par exemple du gel de silice : 20 kg /m3, Artsorb : 0,5 à 1 kg/m3).
Dans ce cas, un système permettant une installation discrète et efficace du matériau tampon doit être intégré au moment de la conception de la vitrine.
Dans les deux cas, il faut contrôler l'humidité relative régnant à l'intérieur des vitrines grâce à un hygromètre (mesure ponctuelle, ou mieux, mesure continue).
Les vitrines d'exposition doivent être construites avec des matériaux inoffensifs pour les documents exposés et classés M1. L'intérieur des vitrines doit être au besoin protégé avec des revêtements isolants et lisses. Les matériaux suivants sont inoffensifs : métal (à condition d'être traité anticorrosion), verre, céramique, polyéthylène, polyacrylates, polycarbonates, polystyrène, polyesters (attention à la composition et l'éventuel effet électrostatique), coton ou lin non teints. Certaines fibres protéiniques (notamment la laine), peuvent dégager du soufre en se dégradant. Les textiles ayant subi un traitement particulier (teinture, traitement ignifuge) doivent être testés au préalable.
Le bois peut dégager des quantités importantes de vapeurs d'acides organiques. Les bois à proscrire absolument sont : le chêne, le bouleau, le hêtre et les matériaux composites à base de bois contenant des colles de formaldéhyde.
Certains objets exposés peuvent également dégager des substances nocives. Si tel est le cas, il faut les exposer séparément. De la même manière, il faut éviter de placer dans la même vitrine des objets dont les conditions de conservation sont très différentes.
De manière générale toutes les surfaces en contact avec le document exposé ne doivent pas présenter d'aspérités et ne doivent pas dégager de substances nocives (acides, bases, plastifiants...).
Sécurité
Les vitrines doivent être solides et stables. Les vitres de la vitrine doivent être de préférence en verre renforcé (Sécurit).
L'accès à l'intérieur des vitrines doit être impossible aux visiteurs et les vitrines doivent être munies au besoin d'une alarme. En revanche, un accès doit être aménagé pour les conservateurs et restaurateurs lorsqu'il est nécessaire d'intervenir dans la vitrine au cours de l'exposition. Pour des raisons d'étanchéité des vitrines et de sécurité, le système d'enlèvement des vitres par ventouses est à préférer à l'aménagement de portes dans les vitrines.
Supports des documents
Les supports des documents doivent être conçus sur mesure pour le document en cherchant à épouser sa forme et en prenant en compte son poids, afin de minimiser les contraintes. Les matériaux utilisés pour la confection des supports doivent être chimiquement inertes (polyacrylates ("Plexi ou Altuglass"), mousses de polyéthylène ou de polypropylène, carton permanent, film de polyester).
Les matériaux fixant le document au support doivent être également stables (par exemple des bandes de polyester). Lorsque des contraintes s'exercent sur le document, ces fixations doivent lâcher en premier, afin de ne pas détériorer mécaniquement le document.
Les matériaux utilisés pour l'encadrement ne doivent présenter aucun risque pour les documents. Les documents doivent être montés sur des charnières, afin de minimiser les contraintes mécaniques. Les documents encadrés ne doivent pas être désencadrés sans l'accord exprès du responsable de la collection.
(*) cf Sécurité incendie / Socotec & Grandjean Ph. - Paris, Le Moniteur, 1996. [MLV.